LA QUÊTE DU GRAAL

LES DRUIDES SAISON 2  ÉPISODE 21

BRENNUS (2ème partie)

Les secrets de l’aventure la plus extraordinaire de tous les temps : La Quête du Graal.

LE CIEL ÉTOILÉ

Il semble que les Celtes ont lancé des expéditions pour voler les talismans de leurs voisins. Ce talisman est une pierre qui symbolise le centre du monde, un omphalos. La présence de cette pierre fait du site où elle est entreposée un lieu sacré (locus consecratus). Des indices laissent à penser que c’est une pierre tombée du ciel, c’est-à-dire une météorite. Or, cette histoire est inscrite dans le ciel étoilé depuis la nuit des temps et ne demande qu’à être décryptée. Pour cela il suffit de consulter une carte du ciel. C’est un ensemble de trois constellations qui va nous intéresser dans cet article. Il s’agit d’un corbeau (Corvus), une coupe (Crater)[1] et un serpent (Hydra), l’Hydre de Lerne[2].

LA QUÊTE DU GRAAL. Hydra, Corvus and Crater constellations in Johannes Hevelius Celestial Atlas.

Hydra, Corvus and Crater constellations in Johannes Hevelius Celestial Atlas.

En ce qui concerne le serpent l’explication est simple il est le dragon gardien du trésor. Pour les Grecs, le dragon n’étant qu’un serpent monstrueux. Voir à ce propos SAISON 1 ANNEXE 11 Les métamorphoses du dragon.

LE DIEU APOLLON

Le corbeau est un animal symbole, les hindous diraient l’animal véhicule, habituellement attribué au dieu Apollon. D’ailleurs lors du combat de Zeus contre le monstrueux Typhon, les dieux grecs s’enfuient en Égypte et prennent pour mieux se dissimuler une forme animale. Pour Apollon c’est l’apparence d’un corbeau. Quant à la coupe elle symbolise l’objet mystère dont s’empare le dieu. Et que raconte cet ensemble de constellations ? Rien de moins que la prise de Delphes par Apollon.

Apollon, fils de Zeus par Leto[3], est un enfant né avant terme, à sept mois ; mais les dieux grandissent vite. Thémis[4] le nourrit de nectar et d’ambroisie et à l’aube du quatrième jour il demanda un arc et des flèches qu’Héphaïstos[5] lui procura immédiatement. En quittant Délos il se dirigea droit vers le mont Parnasse où se cachait le dragon Python, ennemi de sa mère et le blessa grièvement de ses flèches. Python s’enfuit vers l’oracle de la Terre Mère à Delphes, cité qui porte ce nom en l’honneur du monstre Delphyné[6], son compagnon ; mais Apollon eut l’audace de le poursuivre jusque dans le sanctuaire et là le tua près de la fissure sacrée[7].

On retrouve ces trois éléments le corbeau, la coupe et le serpent sur une pièce de monnaie grecque. Sur laquelle on peut voir à gauche Apollon (le corbeau) au centre l’Holmos, un chaudron posé sur un trépied et à droite le serpent Python, le gardien du sanctuaire de Delphes.

LA QUÊTE DU GRAAL. Apollon affronte le serpent Python, avec pour enjeu l’Holmos, un chaudron posé sur un trépied. Crotone, Lucanie, vers 420 av. J.C.

Apollon affronte le serpent Python, avec pour enjeu l’Holmos, un chaudron posé sur un trépied. Crotone, Lucanie, vers 420 av. J.C.

LES EXPÉDITIONS GAULOISES

Les mêmes événements se répètent en 280 av. J.-C., une expédition gauloise menée par un dénommé Brennus (le corbeau) s’empare du sanctuaire de Delphes et pille les trésors sacrés. Le chef de l’expédition se nomme Brennus, or ce nom correspond au vieux celtique Branos (corbeau) qui par la chute de la syllabe finale a donné en breton, gallois et irlandais Bran, qui signifie le « corbeau ».

BRENNUS

C’est donc la même histoire qui apparaît dans plusieurs mythes : un corbeau (Apollon ou Brennus) s’empare non seulement du sanctuaire du serpent mais également d’un précieux talisman.

Or Bran/Brennus est un personnage considérable de la tradition celtique. Ce sont en fait plusieurs personnages qui apparaissent tout au long de l’histoire mais ils ont tous un point en commun, ils sont tous les héros d’une quête. Ces différents personnages portant le même nom s’expliquent par le fait que Brennos (Brennus en latin) n’est pas un nom, mais un titre honorifique ou un grade initiatique au sein du druidisme. Celui d’un chef de guerre qui comme son modèle dans le ciel étoilé se lance dans une expédition pour dérober un précieux talisman. Ces expéditions celtiques à la recherche d’un talisman sont des ancêtres de la Quête du Graal.

D’autres étymologies ont été proposées et sont possibles, la pensée druidique est multiple. Cependant d’après la Religion des Étoiles des druides, il ne peut être qu’un corbeau. Sans aucun doute possible.

LA QUÊTE DU GRAAL. Le corbeau attaque le serpent pour lui voler la coupe. Constellations du Corbeau, de la Coupe et de l’Hydre, Domenico Bandini, Fons memorabilium universi

Le corbeau attaque le serpent pour lui voler la coupe. Constellations du Corbeau, de la Coupe et de l’Hydre, Domenico Bandini, Fons memorabilium universi ( Lambeth Palace Library, London, UK)

LA QUÊTE D’UN PRÉCIEUX TALISMAN

Il est indéniable que la figure centrale de cette quête est le Corbeau, qui investit le sanctuaire du dragon, le tue, et s’empare du talisman sacré. Celui-ci peut prendre comme nous allons le voir différents aspects coupe, chaudron, œuf de serpent, pierre. Mais la pièce principale de tout sanctuaire est l’omphalos la pierre sacrée tombée du ciel, une météorite qui symbolise le centre du monde.

Mais au fait pourquoi dans ces différentes versions de la quête le talisman peut-il changer de nature. Tout simplement parce que le sanctuaire contient plusieurs objets importants : un pilier central, une pierre sacrée, un chaudron et même une tête coupée. Le poète qui élabore ces histoires n’a que l’embarras du choix pour désigner sous une forme ou une autre le talisman que le héros doit dérober. Voir à ce propos SAISON 2 ANNEXE 13 Le Graal et SAISON 2 ANNEXE 24 le sanctuaire des druides

C’est pourquoi il faut étudier ces différentes versions de la quête en détail.

Elles ont pour héros un dénommé Brennos qui apparaît dans plusieurs récits historiques ou mythologiques mettant en scène les Celtes.

LES BRENNOS HISTORIQUES

BRENNOS ET ROME

Au IVe siècle av. J.-C., les Celtes entrent dans l’histoire à travers les textes des auteurs latins et grecs, les druides ayant interdit l’usage de l’écriture. Voir SAISON 1 ANNEXE 26 Les druides et l’écriture

C’est pourquoi les Celtes n’ont pas écrit leur propre histoire et que se sont leurs futurs ennemis qui se sont chargés de transcrire les événements les concernant. Ce qui n’est jamais à leur avantage.

Les Gaulois, toujours à la recherche de nouvelles terres, se sont installés dans le Nord de l’Italie. Cette expansion n’est pas sans conséquence puisque ces différentes tribus se sont retrouvées face à la puissance montante de la péninsule italienne : Rome. Sous la conduite d’un dénommé Brennus, les Gaulois attaque les Romains en 386 av. J.-C. sur les rives de l’Allia et leur infligent une défaite cinglante. Cette défaite est pour les Romains d’un des épisodes les plus traumatisants de leur histoire. Ils s’en souviendront longtemps et ne rêvent que de vengeance pour réparer ce déshonneur. Voir à ce propos SAISON 1 ANNEXE 38 La bataille de l’Allia

D’après les textes, Brennos, le chef légendaire de l’expédition des Celtes contre Rome, aurait été un roi (regulus) de la tribu gauloise des Sénons.

LE SAC DE ROME

Après la déroute de l’Allia, Rome est sans défense. Comme souvent tout au long de l’histoire, les adversaires de Rome perdent leur temps avec des pillages et des beuveries pour fêter leur victoire. Cependant ces pillages sont nécessaires pour récompenser l’effort des guerriers lors des batailles. Ce délai permet aux Romains de se barricader dans leur centre sacré, le Capitole. Le reste de ville est pillé et saccagé par les Gaulois. Cependant le Capitole ne tombe pas aux mains des hommes de Brennos. Les Romains doivent payer une énorme rançon aux envahisseurs pour qu’ils repartent.

MALHEUR AUX VAINCUS

Selon une anecdote rapportée par Tite-Live, Brennos est convaincu que les Romains utilisent des poids truqués pour peser la rançon de mille livres d’or qu’il leur a imposé. Les Romains protestent, alors Brennos jette sa lourde épée dans la balance en déclarant « vae victis » (« malheur aux vaincus »).

Au-delà de l’or pour payer ses troupes, l’objectif de Brennos est de s’emparer des objets sacrés qui garantissent la puissance de Rome. Si les Gaulois occupent la ville, ils ne peuvent investir le Capitole, centre religieux des Romains. De toute façon, le trésor sacré n’est plus à Rome car après la défaite traumatisante de l’Allia, une des premières mesures prises par les autorités romaines est de mettre en lieu sûr les objets sacrés de la ville. Ce qui est fait à Cæré, cité étrusque alliée. C’est pourquoi d’un point de vue religieux, l’expédition gauloise est un échec malgré le fait que les Gaulois ont conquis la ville. Cependant le centre sacré de Rome, le capitole n’a pas été pillé et la puissance romaine n’a pas été tuée dans l’œuf, la ville éternelle pourra ainsi étendre son territoire et devenir le centre du monde. Cet échec, les Gaulois le paieront très cher, ils feront l’objet d’une conquête à leur tour et perdront leur indépendance.

UNE ARMÉE FICTIVE

D’après Tite-Live, le général Camille intervient ensuite à la tête de son armée de secours juste au bon moment pour contester la légalité de la rançon. Cette intervention provoque un combat avec les Gaulois de Brennus qui sont défaits. Cet épisode avec Camille, l’homme providentiel, est aujourd’hui considérée comme un mensonge de l’auteur permettant de disculper les Romains de la honte d’avoir dû marchander leur survie. Cependant le sac de Rome est considéré comme une souillure d’ordre sacré puisque Tite-Live indique que Camille s’occupe avant tout de faire reconstruire et purifier les temples, puis il fait rendre hommage aux dieux protecteurs de la cité. Cette expédition de Brennus fait vaciller la ville sur ses fondations. Car les Romains ont bien vécu cette invasion pour ce qu’elle est, la tentative de s’emparer des objets sacrés de la ville de Rome.

Cependant cette expédition reste un échec pour les Gaulois. Parce que la pierre sacrée est encore aujourd’hui présente dans la ville puisque Rome est toujours un centre sacré même si le Christianisme a remplacé l’ancienne religion romaine.

LA QUÊTE DU GRAAL. Stèle du Lapis niger, Musée des Thermes de Dioclétien.

Stèle du Lapis niger, Lapis niger signifie « pierre noire « , c’est à dire une météorite,  il semble évident que cette pierre est une copie de l’originale. Musée des Thermes de Dioclétien. (Wikimedia Commons).

BRENNOS ET DELPHES

Commandant en chef, avec Akichorios, de la Grande Expédition des Celtes contre la Macédoine et la Grèce, en 280 av. J.-C. Brennos attaque Delphes, le centre spirituel de la Grèce, et veut s’emparer des trésors du temple d’Apollon. C’est ici que la légende prend le dessus puisque les auteurs grecs racontent qu’un tremblement de terre, la foudre qui réduit en cendres les combattants, une formidable tempête de neige, une pluie de grosses pierres et même une apparition dans le ciel des héros de l’ancien temps empêchent les guerriers gaulois de s’emparer du sanctuaire de Delphes. Cela ne suffit pas, car lors la nuit suivante les Gaulois sont pris d’une terreur panique et s’entretuent dans la confusion générale, sans compter les troupes grecques qui harcèlent les survivants. Brennos est blessé et se sentant responsable de la malédiction qui poursuit les Gaulois s’empoisonne lui-même et ne pouvant supporter ses souffrances, il met fin à ses jours d’un coup de poignard.

LA QUÊTE DU GRAAL. Galate se suicidant avec sa femme Attribué à Epigonos de Pergame, copie romaine d'un original en bronze, 230 - 220 BC.

Galate se suicidant avec sa femme Attribué à Epigonos de Pergame, copie romaine d’un original en bronze, 230 – 220 BC, Musée National de Rome.

L’INTERVENTION D’UN DIEU

Comme les Romains avant eux qui ont inventé le retour glorieux d’un de leurs généraux, Camille qui triomphe des Gaulois. Les Grecs eux-aussi inventent des cataclysmes et l’intervention des dieux et des héros des temps passés. Tout ceci pour cacher l’horreur du vol du talisman. Si Rome est un échec pour le premier Brennus. On peut penser que la mission du deuxième Brennus est un succès.

HISTOIRE ET MYTHOLOGIE

Les sources antiques s’accordent pour attester cette expédition vers Delphes. C’est un fait historique puisque qu’une partie de ce corps expéditionnaire a fondé le royaume de Tylis en Thrace et celui des Galates en Asie Mineure. Il n’y a pas de doute cette épopée celtique vers Delphes est historique, mais elle correspond également à un mythe qui est inscrit dans le ciel étoilé. Il ne faut jamais oublier que les mythes druidiques ont toujours plusieurs niveaux de lecture. « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut » selon la formule alchimique ». Tout d’abord le modèle céleste qui est inscrit dans les étoiles qui ensuite trouve sa traduction à travers les événements terrestres.

ÉCHEC OU SUCCÈS

Pour les auteurs de l’Antiquité, l’expédition vers Delphes est un échec. Plusieurs indices parlent cependant en faveur d’un succès du projet gaulois.

  • Les Volques Tectosages, une des tribus qui a participée au raid vers Delphes, est entré d’après les textes ultérieurs en possession du trésor de Delphes. Ce qui a engendré la légende de l’or maudit de Toulouse. Voir à ce propos SAISON 1 ANNEXE 29 L’or de Toulouse

  • Les Grecs ont remplacé à un moment donné leur omphalos par une copie en marbre.

LA QUÊTE DU GRAAL. « Omphalos », copie d'époque romaine, Musée archéologique de Delphes.

« Omphalos », copie d’époque romaine, Musée archéologique de Delphes. (Wikimedia Commons).

  • Le sanctuaire est finalement abandonné et tombe en ruine. Tout simplement parce que la pierre n’était plus là.

Ruines actuelles du temple d'Apollon à Delphes.

Ruines actuelles du temple d’Apollon à Delphes. (Wikimedia Commons).

L’OMPHALOS DE DELPHES

Certains auteurs avancent même l’idée que le trésor de Delphes était vide lorsque les Celtes ont lancé leur expédition. Si pour les hommes de Brennus le butin est très important. L’or et l’argent étant le salaire des guerriers. Brennos, comme son nom l’indique, poursuivait cependant un autre objectif : voler le talisman sacré de Delphes, l’omphalos, la pierre qui indique le centre du monde grec. Brennus devait, comme son modèle dans le ciel étoilé, voler le talisman sacré dans le sanctuaire des dieux. C’est la pierre sacrée qui est le véritable trésor. C’est par sa présence que le sanctuaire est sacré et qu’il engendre les dons des pèlerins. Ce n’est qu’après que les offrandes agrandissent le trésor du sanctuaire. L’effet inverse est vrai aussi, la disparition entraîne l’abandon du sanctuaire. C’est pourquoi la disparition de la pierre sacrée doit être un secret bien gardé par les auteurs grecs de l’Antiquité. C’est pourquoi ils ont inventé une intervention divine. Mensonge utile puisque le sanctuaire, sans sa pierre sacrée originelle, perdurera encore pendant plusieurs siècles.

LA MISSION DU HÉROS

Comme lors de l’expédition vers Rome, Les Celtes cherchent du butin et de nouvelles terres. Mais comme le premier, le second Brennus a une mission personnelle. Il doit dérober, l’omphalos, le talisman qui symbolise pour les Grecs le centre du monde. Cette mission semble avoir été accomplie puisque contrairement à Rome, Delphes est aujourd’hui en ruine, les objets sacrés ayant disparus.

LES BRENNOS MYTHIQUES

BRAN LE BÉNI

Bran le Béni (ou Bran Vendigeit), est un personnage de la mythologie celtique brittonique, qui apparaît notamment dans la deuxième branche du Mabinogi :  Le Mabinogi de Branwen.

Voici l’histoire de Bran.

Le roi d’Iwerddon (Irlande) Matholwch débarque dans l’île de Bretagne pour conclure un traité de paix avec Bran le Béni souverain du royaume de Gwynedd (région du Pays de Galles) et lui demander la main de sa sœur Branwen. La proposition est acceptée. Cependant Evnissyen, leur demi-frère, furieux de ne pas avoir été consulté, mutile les chevaux des Irlandais. Il leur coupe les lèvres, les oreilles et la queue. Devant cet affront Matholwch veut rompre les entretiens et partir. En guise de compensation, Bran lui offre de nouveaux chevaux, des baguettes d’argent et un plat en or. Pour contenter le roi irlandais Bran doit encore rajouter un chaudron magique qui ressuscite les guerriers morts au combat.

Je parferai la réparation en te donnant un chaudron dont voici la vertu : si on te tue un homme aujourd’hui, tu n’auras qu’a le jeter dedans pour que le lendemain il soit aussi bien que jamais, sauf qu’il n’aura plus la parole[8].

Branwen suit son époux Matholwch en Irlande. Au début tout se passe bien et Branwen donne le jour à un fils, Gwern.

LES MALHEURS DE BRANWEN

Mais bientôt elle tombe en disgrâce, à cause de rumeurs relative à la mutilation des chevaux du roi. Les nobles du pays exigent de Matholwch qu’il exerce sa vengeance sur la personne de Branwen. Elle est chassée de la chambre du roi et est condamnée à faire la cuisine à la cour et tous les jours le cuisinier doit lui donner une gifle. Le roi fait emprisonner tous les Bretons qui sont sur son territoire et coupe les relations avec la Bretagne. Son humiliation dure trois années, mais Branwen apprivoise un étourneau et parvient à envoyer un message à son frère, attaché à la patte de l’oiseau dressé. Dès que Bran a connaissance de la situation, il organise une expédition militaire contre l’Irlande. Finalement les deux rois veulent faire la paix, mais Evnissyen assassine son propre neveu, le fils du roi, en le jetant dans un feu ce qui déclenche une guerre sans merci entre les Irlandais et les Bretons.

LES MORTS REVIENNENT À LA VIE

Cependant les Irlandais ont une arme secrète, le fameux chaudron qui ressuscite les guerriers morts.

Les Gaëls se mirent à allumer du feu sous le chaudron de résurrection. On jeta les cadavres dedans jusqu’à ce qu’il fût plein. Le lendemain, ils se levèrent redevenus guerriers aussi redoutables que jamais, sauf qu’ils ne pouvaient plus parler[9].

Les troupes du roi d’Irlande sont continuellement renouvelées tandis que les Bretons sont de moins en moins nombreux. Devant cette situation désespérée Evnissyen à des remords. Il veut se racheter et se dissimule parmi les cadavres des Irlandais. C’est ainsi qu’il est jeté dans le chaudron. Il se distend tellement que sa poitrine se brise et que le chaudron éclate. Les Bretons sont finalement vainqueurs, mais seul sept guerriers survivent à la terrible bataille.

LE HÉROS EST TUÉ

Bran a été blessé à la jambe par une lance empoisonnée. Il ordonne à ses compagnons de lui couper la tête et d’emporter celle-ci avec eux dans l’île de Bretagne. Branwen qui a perdu son frère et son fils a le cœur brisé, elle meurt peu de temps après avoir accostée sur l’île de Mona (Anglesey). Les sept compagnons vivent longtemps en compagnie de la tête de Bran qui continue à converser après sa mort et à festoyer avec les siens. Cela dure quatre-vingt ans ensuite selon le vœu de Bran, ils enterrent la tête dans la Colline Blanche de Londres, car ainsi elle protègera l’île de Bretagne contre tous les envahisseurs.

L’objectif de Bran est de récupérer un objet précieux à la cour du roi d’Irlande : le chaudron de résurrection. Tara, résidence des Ard ri Érenn « les rois suprêmes », est le centre religieux et spirituel du pays. Le site a été abandonné et les talismans sacrés des Tuatha Dé Danann (tribus de la déesse Dana) : le chaudron de Dagda, l’épée de Nuada, la lance de Lug et la pierre de Fâl, la pierre de souveraineté, ont disparus.

Comme Brennos, Bran doit récupérer un précieux talisman et il meurt empoisonné.

BRENNOS ET STONEHENGE

BRENNIUS

Brenne (Brennius en latin) est un prince légendaire de l’île de Bretagne (actuelle Grande-Bretagne), dont la légende est rapportée par Geoffroy de Monmouth dans son Historia regum Britanniae (vers 1135). Brenne est le roi du Northumberland et le duc des Allobroges.

RIVALITÉ ENTRE DEUX FRÈRES

À la mort de Dunvallo les deux frères Belin (Belinus en latin) et Brenne se disputent la couronne du royaume de Bretagne et partent en guerre l’un contre l’autre. Après plusieurs batailles, un compromis est trouvé. Belin, l’ainé des deux, devient roi des Bretons et gouverne les territoires de Loegrie, de Cambrie et de Cornouailles. Brenne reçoit la Northumbrie. Après cinq années de paix les hostilités reprennent. Les armées des deux frères se rencontrent dans la forêt de Calaterium. Brenne doit s’enfuir et trouve refuge en Gaule, pendant que Belin prend le contrôle de toute l’île de Bretagne. Pendant son exil, Brenne devient le duc des Allobroges et constitue une nouvelle armée. Il construit une flotte et débarque dans l’île de Bretagne. Sur le champ de bataille, leur mère Conwen réconcilie les deux frères.

Brennus et Belinus, fils de Donnebrant, réconciliés par leur mère, Enluminure vers 1465-1485. 

Brennus et Belinus, fils de Donnebrant, réconciliés par leur mère, Enluminure vers 1465-1485.  (France, Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 935 f. 027)

LA CONQUÊTE DE ROME

Belin et Brenne fusionnent leurs armées et envahissent la Gaule. Après une année de conquêtes, ils parviennent à soumettre tous les royaumes francs de Gaule sous leur autorité. Ils pénètrent alors en Italie et menacent Rome. Après une résistance de plusieurs jours, les Bretons finissent par entrer dans la ville et imposent un tribut aux Romains.

LES MYTHES CELTES

Cette version semble contenir deux récits différents. Dans le premier, la rivalité entre deux frères qui se combattent pour la royauté sur l’île de Bretagne. Dans le second, une expédition vers Rome qui semble reprendre l’histoire du premier Brennos.

Dans le ciel étoilé les deux frères jumeaux se disputent le centre du ciel et ses objets sacrés. Ce qui est également le cas sur terre dans un récit étrange dénommé Cad Goddeu (« combat des arbrisseaux) qui décrit une bataille mystérieuse dont l’enjeu est le centre de l’île de Bretagne : le monument mégalithique de Stonehenge. C’est une bataille entre magiciens puisque pour y parvenir il faut deviner le nom de son adversaire pour prendre l’ascendant sur lui. Gwydion, un magicien, anime les arbres de la forêt pour combattre les envahisseurs et finit par triompher en devinant le nom de Bran par la branche d’aulne que Bran portait, l’aulne étant l’un des principaux symboles de Bran. Le Cad Goddeu est une bataille entre les occupants antérieurs, prêtres établis là depuis l’âge du bronze, alliés aux tribus bretonnes insulaires et adorateurs de Beli (le dieu solaire gaulois Belenos « le Brillant ») et d’autre part des tribus brittoniques venant du continent sous la conduite de Brennos.

Comme à Delphes, Brennos est vaincu, mais l’expédition vers Stonehenge a été couronnée de succès. La pierre sacrée est de toute évidence plus là et le site est en ruine.

Ruine du monument mégalithique de Stonehenge.

Ruine du monument mégalithique de Stonehenge.

L’ŒUF DE SERPENT

Il existe un autre texte transmis par Pline qui illustre la triade corbeau-coupe-serpent que l’on trouve parmi les constellations du ciel étoilé. Il faut d’abord citer le texte en entier pour en tirer ensuite la quintessence, la trame du récit primitive.

Il existe, en outre, une autre espèce d’œufs en grand renom dans les Gaules et dont les Grecs n’ont pas parlé. Des serpents s’enlacent + en grand nombre + ; avec leur bave et l’écume de leurs corps ils façonnent une sorte de boule appelée + urinum +. Les druides disent que cette façon d’œuf est projetée en l’air par le sifflement des serpents, et qu’il faut la rattraper dans un manteau sans lui laisser toucher la terre ; que celui qui s’en est emparé doit s’enfuir à cheval, car les serpents le poursuivent jusqu’à ce qu’ils soient arrêtés par l’obstacle d’une rivière ; l’épreuve qui fait reconnaitre cet œuf est qu’il flotte contre le courant, même s’il est attaché avec de l’or. De plus avec cette ingéniosité qu’ils ont à envelopper de mystères leurs mensonges, les Mages prétendent qu’il faut les prendre pendant une certaine lune, comme s’il dépendait de la volonté humaine de faire coïncider avec cette lune l’opération des serpents. J’ai du reste vu cet œuf : il était de la grosseur d’une pomme ronde moyenne, et sur sa coque se remarquaient de nombreuses cupules cartilagineuses semblables à celle dont sont munis les bras des poulpes. Les Druides vantent fort son merveilleux pouvoir pour faire gagner des procès et pour faciliter l’accès auprès des souverains, mais c’est une si grande imposture qu’un chevalier romain du pays des Vocontiens qui, au cours d’un procès, en portait un sur son sein, fut mis à mort par l’empereur Claude sans autre motif que je sache. Pourtant ces enlacements de serpents et leur union féconde semblent être la raison qui a déterminé les nations étrangères à entourer, en signe de paix, le caducée de l’image de serpents ; c’est l’usage en effet que les serpents du caducée n’aient pas de crêtes[10].

Texte pour le moins obscur. Il est évident que Pline n’a pas tout compris ou plus simplement, comme l’enseignement des druides devait rester secret, il n’a pas eu connaissance de toutes les données nécessaires pour reconstituer le mythe fondateur du druidisme.

Cependant la donnée centrale du récit qu’il faut retenir est la suivante : un humain (sans doute un druide) doit pénétrer le domaine des serpents pour dérober un objet que l’auteur qualifie d’œuf et de s’enfuir le plus rapidement à cheval poursuivi par les ophidiens jusqu’au limite du monde des mortels symbolisé par une rivière.

L’AUTRE MONDE

Ces serpents sont bien les habitants de l’Autre Monde, ce qui est confirmé par les traditions.

On conçoit généralement les habitants de l’Autre Monde sous une forme ophidienne[11].

C’est une croyance ancienne que de croire que les défunts se transforment en serpents. Même Pythagore dont l’enseignement semble proche de celui des druides semble adhérer à ce concept de génération spontanée.

Selon Pythagore, il nait un serpent de la moelle épinière d’un cadavre d’homme[12].

Donc cet humain pénètre, l’Autre Monde pour s’emparer d’un talisman. Ce personnage accompli le même exploit que Brennos et Apollon, il pénètre le sanctuaire du serpent pour dérober l’omphalos, la pierre sacrée qui symbolise le centre du monde. On peut avancer l’hypothèse sans trop se tromper que ce personnage portait le nom du corbeau dans le mythe gaulois originel : Brennos

Ce qui signifie également que les serpents sont les âmes des défunts qui poursuivent le héros et elles sont obligées de s’arrêter aux portes de notre monde, symbolisé par un cours d’eau. Les druides nous apprennent à travers ce récit que le dragon ou le serpent est le gardien des trésors de l’Autre Monde autrement dit le secret de l’immortalité.

UNE PIERRE PRÉCIEUSE

Il existe dans le folklore de diverses provinces de France un enlacement de serpents qui ne produisent pas un œuf extraordinaire, mais une pierre précieuse[13].

Les couleuvres, les serpents et les anvots[14] de la Sologne se réunissent en un seul monceau, tous entassés ensemble, de manière que la masse fait un volume plus gros qu’un poinçon. Quand ils sont ainsi rassemblés sur les bords d’un étang situé entre Ardon et Jouy, ils travaillent ensemble à la formation d’un gros diamant. Chacun dégorge une espèce de liqueur très brillante qu’il a sous la langue. Les deux plus habiles ou reconnus tels parmi eux, reçoivent cette liqueur qui se congèle. Ils la pétrissent, et la besogne faite, chaque animal se traine sur le diamant qu’il polit par le frottement de son corps et se retire dans l’étang. Le dernier d’entre eux le jette dans l’eau ou il reste jusqu’à ce que quelquefois quelqu’un le trouve en pêchant[15].

Une histoire comme celle-ci ne s’invente pas ! La ressemblance avec les serpents druidiques est trop grande pour être due au hasard. Sauf que le résultat est un magnifique diamant et non l’œuf cosmique à l’origine de tout.

LE PAPE ET LES SERPENTS

Un autre récit collecté en Catalogne donne quelques indications en plus.

On croit que les serpents qui atteignent l’âge de sept ans ne peuvent pas mourir de mort naturelle, et qu’ils ne succombent qu’accidentellement. Ils gagnent alors la terre de Babylone, et là ils conspirent et trament mille maléfices contre l’humanité. Chaque année, le dimanche des rameaux, le Pape y va chercher les saintes huiles, qui sont faites avec les œufs de certains reptiles. Le Pape conjure la grande troupe des serpents qui s’y trouve réunie et leur interdit de faire le mal. Alors, en rampant, ils montent jusqu’au sommet de la tour de Babel où, comme ils sont si nombreux à monter, se produit une grande confusion. Et comme les serpents n’ont aucun moyen de redescendre, ils se jettent en bas et meurent. Heureusement qu’il y a la conjuration que fait le Pape, car sans elle ils empoisonneraient et renverseraient le monde entier[16].

Tout y est, les serpents enlacés, les œufs aux vertus extraordinaires, mais dans ce texte, le voleur devient le Pape lui-même qui récupère les œufs de serpents pour produire les saintes huiles. Or le Pape est un prêtre, le plus haut placé dans l’ordre hiérarchique, le chef de l’Église. On peut se demander si la subtilisation de l’œuf de serpent gaulois n’était pas réservée au druide le plus haut placé, en quelque sorte un Grand-Prêtre. En tous cas un homme qui porte le titre et le nom du corbeau. À noter que le vingt-et-unième pape de 250 à 253 portait le nom de Corneille dérivé du latin cornix qui signifie « corbeau ».

LA PIERRE DU DRAGON

Il ne reste plus qu’à répondre à une question. Quelle est la nature de ce mystérieux talisman ?

Comme le dit Hermès Trismégiste dans son texte la Table d’émeraude : ce qui est en bas est comme ce qui est en haut et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas. Cette formule alchimique semble indiquer que ce fameux talisman est tout simplement la projection sur terre de l’étoile polaire contenue dans la queue du Dragon céleste[17].

Autour de 2700 av. J.-C., l’étoile polaire se situait dans la queue de la constellation du dragon, le grand serpent céleste.

Trajet de l’axe du pôle nord sur la voûte céleste sous l’effet du mouvement de la précession des équinoxes, à noter l’étoile polaire (Polaris) actuelle à la pointe de la queue de la Petite Ourse et l’étoile polaire vers 2700 av. J.-C. dans la queue de la constellation du Dragon (en rouge). JPS2023

Trajet de l’axe du pôle nord sur la voûte céleste sous l’effet du mouvement de la précession des équinoxes, à noter l’étoile polaire (Polaris) actuelle à la pointe de la queue de la Petite Ourse et l’étoile polaire vers 2700 av. J.-C. dans la queue de la constellation du Dragon (en rouge). JPS2023

Ce qui donne dans la pratique l’image d’un serpent lové autour d’un œuf.

Le serpent enroulé autour de l’œuf cosmique (gravure du XIXe siècle).

Le serpent enroulé autour de l’œuf cosmique (gravure du XIXe siècle).

Dans les légendes, cette étoile est souvent symbolisée par une pierre précieuse : diamant ou rubis.

UN MYTHE GALLOIS

Ce qui est aussi le cas dans la mythologie celtique, notamment dans un récit gallois mettent en scène un héros dénommé Peredur (l’équivalent gallois du Perceval de Chrétien de Troyes). Après quelques aventures, Peredur doit s’emparer d’une pierre précieuse qui se trouve dans la queue d’un serpent. Un chevalier noir lui dit ceci :

Seigneur, voici : c’est en me battant avec le serpent noir du Carn[18]. Il y a un monticule qu’on appelle Cruc Galarus (le Tertre douloureux), et sur ce monticule il y a un carn, dans le carn un serpent, et dans la queue du serpent une pierre. La pierre a cette vertu que quiconque la tient dans une main peut avoir, dans l’autre, tout ce qu’il peut désirer d’or. C’est en me battant avec le serpent que j’ai perdu mon œil[19].

Le héros gallois tue le serpent et récupère la pierre précieuse et la donne à son vassal Etlym à l’Épée rouge. Cette pierre ressemble à la pierre philosophale des alchimistes qui transforme le plomb en or et qui permet de fabriquer l’élixir de longue vie. La mention d’un chevalier noir et d’un chevalier rouge n’est pas fortuite. Pour réaliser le Grand Œuvre, l’alchimiste doit passer par les étapes Nigredo, Albedo, Rubedo (œuvre au noir, au blanc et au rouge). Peredur étant dans ce cas le chevalier blanc.

On peut noter que dans cette version le héros ne porte pas le nom du corbeau, mais peut-être porte-t ’il le nom d’un des talismans. Peredur peut être relié au gallois peir « chaudron ». Dans le ciel étoilé la constellation du Corbeau est placé à côté d’une Coupe (Crater en latin et kratḗr en grec). Le cratère grec est un vase.

Cratère corinthien, v. 550 av. J.-C.

Cratère corinthien, v. 550 av. J.-C. (Wikimedia Commons).

Qui peut très bien être remplacée par un chaudron dans un milieu celtique, à l’instar de la bassine que l’on nomme le chaudron de Gundestrup.

Le code secret des druides. Chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., Argent doré,

Chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., Argent doré, © Copenhague, Nationalmuseet

Il semble que les druides et les bardes ont joué avec les noms de leurs héros en leur donnant plusieurs significations. Voir à ce propos SAISON 2 ANNEXE 30 Le héros aux mille visages

LE TALISMAN

Si dans le ciel les choses semblent claires avec la triade corbeau-coupe-serpent, il n’en va pas de même ici-bas en ce qui concerne le talisman. Chaque source cite un objet différent. Le texte gallois penche pour une pierre magique proche de la pierre philosophale. Le récit de Pline indique que c’est un œuf de serpent, lui aussi magique. Dans les traditions populaires ce sont des pierres précieuses, diamants ou rubis. Comme la constellation du Dragon ne descend jamais sous l’horizon, il est considéré comme immortel et c’est le fait d’être toujours proche de l’étoile polaire qui lui confère cette immortalité. Ce qui fait du Dragon céleste le gardien du secret de l’immortalité symbolisé par un objet précieux. Il reste à la discrétion de l’auteur du récit de donner une apparence précise à cet objet.

ROBERT E. HOWARD

Que vient faire l’auteur de Conan le Cimmérien dans un article consacré à Brennos ?

Tout simplement parce que cet auteur texan a écrit en 1931 une nouvelle terrifiante intitulée Les Vers de la Terre qui met en scène un héros dénommé… Bran Mak Morn, le roi des Pictes. Voici un résumé de l’histoire.

À Eburacum (York), le cruel gouverneur Titus Sulla règne d’une poigne de fer. Bran, seul contre l’adversité, déguisé en émissaire parthe, assiste impuissant à la crucifixion d’un homme de son peuple. Il parvient à s’échapper de la forteresse romaine en jurant de se venger. Il conclut un pacte avec une sorcière maléfique (une nuit d’amour avec elle) pour atteindre le monde souterrain peuplé de créature mi-humaines mi-serpents, nommé les Vers de la Terre[20]. Elle lui indique le chemin pour atteindre les portes de l’Enfer qui se trouvent dans un tumulus appelé le tertre de Dagon[21].

LA DESCENTE AUX ENFERS

Le tertre abrite, sous une grosse pierre, un puit qui descend dans les entrailles de la terre. Dans une caverne, il voit trouve enfin une Pierre Noire, talisman sacré des créatures reptiliennes. La pierre, noire comme la nuit, posée sur un autel constitué de crânes humains, irradie d’une étrange lueur. Cette pierre servira de monnaie d’échange puisque Bran veut obtenir l’aide des hommes-serpents qui peuplent le sous-sol pour se venger des Romains qui oppriment son peuple. Il s’empare de l’objet et s’élance vers la surface, poursuivi par des ombres cauchemardesques. Il parvient enfin à la frontière séparant les deux mondes.  Il jette ensuite la Pierre Noire dans le lac de Dagon. Avec l’aide de la sorcière, Bran descend dans une autre caverne pour négocier avec les créatures reptiliennes. La pierre en échange de leur collaboration. Bientôt il est cerné par ces ombres serpentines aux dents de vipères.

Les créatures de l'ombre qui menacent Bran. Source: Robert E. Howard, Bran Mak Morn, Éditions Bragelonne, 2009, p.149.

Les créatures de l’ombre qui menacent Bran. Source: Robert E. Howard, Bran Mak Morn, Éditions Bragelonne, 2009, p.149.

Les créatures sont prêtes à tout pour racheter leur pierre sacrée. Elles acceptent les conditions de Bran. La Pierre Noire en échange du gouverneur Titus Sulla qui occupe la Tour de Trajan bien gardée par ses troupes d’élite. Il récupère la pierre en plongeant dans le lac qui abrite, Écosse oblige, un monstre aquatique. Pendant ce temps, les Vers de la Terre ont attaqué la Tour de Trajan par les fondations en creusant des galeries. La tour s’écroule avec fracas et le gouverneur est enlevé dans les profondeurs de la terre par ces êtres malfaisants.

LE CERCLE DE PIERRE

Bran se rend au Cercle de Dagon, un anneau sinistre de grandes pierres avec un grossier autel de pierre en son centre, pour effectuer l’échange. Bran jette la Pierre Noire sur l’autel et les créatures serpentiformes lui offrent en contrepartie un gouverneur halluciné, rendu fou par l’apparence des monstres reptiliens qui l’on entraîné par les plus profonds puits de l’Enfer. Bran décapite finalement Titus Sulla non plus par vengeance, mais par pitié, l’arrogant gouverneur n’étant plus qu’une ombre.

On peut se demander où Howard a puisé l’inspiration pour écrire un récit pareil. Un chef-d’œuvre d’horreur macabre d’une noirceur absolue. En tous cas, la trame originelle est bien présente : Bran (le corbeau) dérobe un précieux talisman à des serpents.

Illustration le la nouvelle. Source: Robert E. Howard, Bran Mak Morn, Éditions Bragelonne, 2009, p.163.

Illustration le la nouvelle. Source: Robert E. Howard, Bran Mak Morn, Éditions Bragelonne, 2009, p.163.

CONCLUSION

Des personnage dénommés Brennos (le corbeau) sont envoyés vers divers centres sacrés, Rome, Delphes, Tara, Stonehenge pour s’emparer de précieux talismans.

Brennus lance une attaque contre Rome en 385 av. J.-C., Brennus pille Delphes le sanctuaire sacré des Grecs en 279 av. J.-C. Bran le Béni, un héros gallois, attaque le royaume d’Irlande pour récupérer un chaudron qui ressuscite les morts. Auxquels il faut ajouter Brennius qui dispute la royauté sur l’île de Bretagne à son frère Belinus avec pour enjeu Stonehenge. Dans un mythe, un druide anonyme (un Brennus à n’en pas douter) dérobe un talisman (l’œuf de serpent) dans l’Autre Monde. Tous ces récits ont en commun un modèle dont les exploits sont inscrits depuis toujours dans le ciel étoilé. Il suffit de lever les yeux vers le firmament pour pouvoir reconstituer un pan entier de la mythologie celtique.

Ces histoires sont cependant incomplètes, il manque des détails importants. En superposant toutes les versions, on peut reconstituer le mythe originel. Car chaque version ne comprend qu’une partie de l’épopée du héros mythique. Il semble d’après les données fournies que le héros doit sacrifier sa vie aux dieux en échange du talisman volé. Ce n’est qu’après cet échange — vie contre talisman — que l’expédition peut être considérée comme une réussite. Brennus meurt dans l’histoire concernant Delphes, ce qui signifie que sa mission est une réussite et que les Celtes ont bel et bien récupéré le bien le plus précieux des Grecs : l’omphalos de Delphes.

©JPS2024 (Certaines partie du texte ont été écrite avant 2016)

[ACCUEIL]

BIBLIOGRAPHIE :

Peredur ab Evrawc, Les Mabinogion, Contes bardiques gallois, Traduction de Joseph Loth, Les presses d’aujourd’hui, Paris, 1979.

Ananda K. Coomaraswamy, La doctrine du sacrifice, Dervy, Paris, 1997

Jean-Pierre Albert, Odeurs de sainteté, École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, 1990.

Paul Sébillot, Le Folklore de France, Tome II, La mer et les eaux douces, E. Guilmoto, Éditeur, Paris, 1905.

Jean Markale, Les Celtes et la civilisation celtique, Éditions Payot & Rivages, Paris, 1999.

Robert Graves, Les mythes celtes, Éditions du Rocher, 1979.

Rudolf Thurneysen, Die Irischen Helden und Königsage. Bis zum Siebzehnten Jahrhundert, Max Niemeyer Verlag, 1921.

Patrice Louinet, Le guide Howard, Éditions ActuSF, 2018.

Robert E. Howard, Bran Mak Morn, Éditions Bragelonne, 2009.

NOTES

[1] Coupe ou vase ou même chaudron comme nous allons le voir.

[2] Née de Typhon et d’Échidna (le mot signifie vipère en grec) ce dragon avait le corps d’un chien et neuf têtes de serpent. Tuer ce monstre est le deuxième des douze travaux d’Héraclès, lui aussi un tueur de dragon notoire. Dans notre cas l’Hydre est la projection étoilée du serpent Python ou de sa compagne Delphyné.

[3] Mère d’Apollon et d’Artémis. Héra, femme de Zeus, trompée par son mari volage, tenta de tuer la malheureuse Leto en envoyant le dragon Python à sa poursuite.

[4] Déesse de la justice et de l’équité.

[5] Dieu du feu, de la métallurgie et des forgerons.

[6] La Déesse-Mère sous sa forme ophidienne. Elle forme avec Python le couple de serpents primordiaux. De leur union nait l’œuf cosmique. Ce sont les divinités principales du sanctuaire de Delphes avant l’arrivée des Indo-Européens. Ces dieux changent de noms au gré des textes, Delphyné et Python dans le cas de Delphes ou Eurynomé et Borée dans le texte de la création des Pélasges ou encore Typhon et Échidna, ils représentent le couple de serpents primordiaux enroulée autour de l’axe du monde.

[7] Les anciens pensaient que de cette fissure émanaient des vapeurs toxiques, qui intoxiquaient la prophétesse du sanctuaire, la Pythie. C’est donc en transe qu’elle prophétisait l’avenir des consultants.

[8] Joseph Loth, Les Mabinogions, Slatkine Reprints, Genève, 2011, p.120.

[9] Joseph Loth, Les Mabinogions, Slatkine Reprints, Genève, 2011, p.143.

[10] Pline l’ancien, Histoire naturelle, Livre XXIX,  XII, par. 52 à 54, Traduction A. Ernout, Les Belles Lettres, Paris, 2003.

[11] Ananda K. Coomaraswamy, La doctrine du sacrifice, Dervy, Paris, 1997, p.107.

[12] Isidore de Séville livre 12, 4, 48.

[13] Pierre précieuse qui peut être mise en parallèle avec la pierre magique contenue dans la queue du serpent du tertre du conte gallois.

[14] Anvoie ou « anguille des haies » nom donné à l’orvet, issu du latin anguis « serpent ». L’orvet n’est un serpent mais un lézard apode, c’est-à-dire des pattes qui se sont atrophiées au cours de l’évolution.

[15] Paul Sébillot, Le Folklore de France, Tome II, La mer et les eaux douces, E. Guilmoto, Éditeur, Paris, 1905, p.443.

[16] Jean-Pierre Albert, Odeurs de sainteté, École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, 1990, p.37.

L’auteur cite d’autres exemples :

Les plus vieux serpents vont à Rome pour faire le Saint-Chrême. Ils sortent des vieux chênes et s’envolent vers Rome.

Chaque année, le Pape va [à Babylone] pour y chercher les saintes huiles, qui sont faites avec les œufs de certains reptiles.

Tous les ans, le Pape va chercher [des serpents à Babylone] pour en faire les Saintes Huiles et les distribuer dans tous les diocèses.

Suivant les textes le Saint-Chrême ou l’huile consacrée, qui sert, rappelons-le, à oindre les rois et les prêtres, est élaboré à partir des œufs de serpent ou parfois des serpents eux-mêmes.

[17]  La constellation du Dragon est considérée comme immortelle puisqu’elle ne disparaît jamais sous l’horizon. Même si le Dragon a perdu son trône en -2300, il reste parmi les immortels. Le Dragon céleste n’est plus sur son trône mais il sommeille pour des millénaires en attendant son grand retour.

[18] Aujourd’hui le terme employé est cairn. Le cairn est un monument mégalithique en pierre sèche qui recouvre un ou plusieurs dolmens à couloir.

[19] Peredur ab Evrawc, Les Mabinogion, Contes bardiques gallois, Traduction de Joseph Loth, Les presses d’aujourd’hui, Paris, 1979, p.220.

[20] Dans les légendes des îles britanniques, devant la quasi absence de serpents, les habitants ont appelé les dragons des vers, comme par exemple le ver de Lambton qui est un ver géant issu du folklore anglais. Il est connu pour avoir terrorisé le comté de Durham, et pour avoir fait peser une terrible malédiction sur neuf générations de Lambton. Le ver de Lambton possède un corps de serpent dépourvu de membres. Sa mâchoire contient des centaines de dents particulièrement aiguisées. Chaque côté de son cou présente neuf branchies d’où suinte un liquide nauséabond. Son corps sécrète une écume blanchâtre qui fait dépérir l’herbe sur laquelle il repose. L’haleine qu’exhale sa bouche est empoisonnée et brûle les feuilles des arbres voisins. Pour plus de détails voir Ver de Lambton — Wikipédia (wikipedia.org)

[21] Dagon ou Dagan est un des principaux dieux des populations sémitiques occidentales antiques de Syrie, vénéré dans le Proche-Orient ancien.

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