HABITS DES DRUIDES

LES DRUIDES SAISON 2 ANNEXE 15

Le chaudron de Gundestrup et l’archéologie montrent que les druides portaient des vêtements beaucoup plus excentriques que ce qui communément admis.

HABILLEMENT DES DRUIDES

Dans l’inconscient populaire les druides portent de longues robes d’un blanc immaculé. Couleur sacerdotale par excellence des traditions indo-européenne.

HABITS DES DRUIDES. Deux druides, d'après une illustration de Antiquitas explanatione et schematibus illustrata (Bernard de Montfaucon, 1719).

Deux druides, d’après une illustration de Antiquitas explanatione et schematibus illustrata (Bernard de Montfaucon, 1719). (Wikimedia Commons).

Ce qui est fort possible, mais n’est pas attesté par les témoignages des auteurs de l’Antiquité.

Dans un texte consacré au gui, Pline mentionne à peine l’habillement des druides.

I1 ne faut pas oublier à propos du gui l’admiration que les Gaulois ont pour cette plante. Aux yeux des druides (c’est ainsi qu’ils appellent leurs mages), rien n’est plus sacré que le gui et l’arbre qui le porte, si toutefois c’est un rouvre. Le rouvre est déjà par lui-même l’arbre dont ils font les bois sacrés ; ils n’accomplissent aucune cérémonie religieuse sans le feuillage de cet arbre, à tel point qu’on peut supposer au nom de druide une étymologie grecque. Tout gui venant sur le rouvre est regardé comme envoyé du ciel : ils pensent que c’est un signe de l’élection que le dieu même a faite de l’arbre. Le gui sur le rouvre est extrêmement rare, et quand on en trouve, on le cueille avec un très grand appareil religieux. Avant tout, il faut que ce soit le sixième jour de la lune, jour qui est le commencement de leurs mois, de leurs années et de leurs siècles, qui durent trente ans ; jour auquel l’astre, sans être au milieu de son cours, est déjà dans toute sa force. Ils l’appellent d’un nom qui signifie remède universel. Ayant préparé selon les rites, sous l’arbre, des sacrifices et un repas, ils font approcher deux taureaux de couleur blanche, dont les cornes sont attachées alors pour la première fois. Un prêtre, vêtu de blanc, monte sur l’arbre, et coupe le gui avec une serpe d’or ; on le reçoit sur une saie blanche ; puis on immole les victimes, en priant que le dieu rende le don qu’il a fait propice à ceux auxquels il l’accorde. On croit que le gui pris en boisson donne la fécondité à tout animal stérile, et qu’il est un remède contre tous les poisons. Tant, d’ordinaire les peuples révèrent religieusement des objets frivoles[1].

Ce texte donne beaucoup d’indications sur la cueillette du gui, mais à propos de l’habillement des druides, il ne nous renseigne guère, sinon qu’il est blanc. Pas de longue robe blanche donc.

D’ailleurs l’iconographie du chaudron de Gundestrup nous dit autre chose.

LA PLAQUE DU DÉFILÉ MILITAIRE

Disons-le tout de suite, les images du chaudron de Gundestrup montrent presque exclusivement des divinités. Cependant les dieux sont les modèles des humains. Cependant une des plaques du chaudron d’argent fait en partie exception. Elle montre une scène de défilé militaire avec des cavaliers, des guerriers et des musiciens qui jouent du carnyx.

HABITS DES DRUIDES. La scène du défilé militaire. Chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., Argent doré.

La scène du défilé militaire. Chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., Argent doré, © Copenhague, Nationalmuseet

Il semble que tous ces personnages sont des humains. Pourtant la scène devient mythologique avec les autres éléments. L’arbre du monde qui pour des raisons pratiques est représenté à l’horizontale. Au pied de cet axe du monde est représenté une scène étrange. Un géant prend un homme par les pieds et semble vouloir le noyer dans une grande cuve. Selon une règle non écrite les divinités sont souvent représentées d’une taille hors du commun et les dieux sont reconnaissable grâce à leurs animaux fétiches. La présence d’un serpent à tête de bélier en haut à droite permet de déterminer l’identité du géant. Il s’agit de Cernunnos. L’homme qui est présenté la tête en bas, n’est pas un personnage quelconque non plus. C’est Orion, identifiable grâce à la présence de son fidèle chien. En fait, cette scène ne présente pas comme on pourrait le penser un sacrifice humain puisque d’après l’histoire que raconte le chaudron de Gundestrup, Orion est déjà mort. Cependant ce qui nous intéresse ici, n’est de déchiffrer cette plaque en argent, mais d’étudier l’habillement des druides.

HABITS DES DRUIDES. Détail de la scène du défilé militaire. Chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., Argent doré, © Copenhague, Nationalmuseet

Détail de la scène du défilé militaire. Chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., Argent doré, © Copenhague, Nationalmuseet

UN HOMME-CHÊNE

Le géant porte un genre de chemise à manches longues et une culotte qui descend jusqu’aux genoux. Cependant, c’est la texture du vêtement qui nous intéresse ici, car elle a quelque chose de spécial, elle ressemble à l’écorce du chêne.

L'écorce d'un chêne.

L’écorce d’un chêne. Photo Adobe Stock.

Une des étymologies possibles du mot druide semble signifier celui « qui connaît » (wid), « le chêne » (dru-). Ce n’est évidemment pas un chêne quelconque, là non plus, mais l’arbre cosmique — l’axis mundi — qui soutient la voûte céleste. Ce qui n’exclut d’ailleurs pas des connaissances poussées en botanique. Car les druides sont des observateurs attentifs du ciel étoilé et de la nature. Leur savoir n’est pas compartimenté, mais forme un tout.

Pourquoi un chêne ?

La Fontaine en donne la raison dans les deux derniers vers du Chêne et le Roseau :

Celui de qui la tête au ciel était voisine / Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts.

C’est bien l’axe du monde qui relie le ciel et la terre qui est évoqué ici. Celui qui relie le domaine céleste des dieux ouraniens au monde souterrain des divinités infernales.

LE FRUIT DU CHÊNE

La ressemblance de la texture de l’habit du géant avec l’écorce du chêne pourrait être un hasard, mais cette affinité avec l’arbre se poursuit avec l’étrange couvre-chef que porte ce même personnage.

La tête du géant, détail de la scène du défilé militaire. Chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., Argent doré.

La tête du géant, détail de la scène du défilé militaire. Chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., Argent doré, © Copenhague, Nationalmuseet

Car son bonnet ressemble à la calotte d’un gland qui est appelée par les botanistes cupule.

Un gland et sa cupule.

Un gland et sa cupule. Photo : Adobe Stock.

Même si ce sont des divinités qui sont représentées dans cette scène. Il ne fait aucun doute que dans la réalité les druides se sont inspirés des vêtements des dieux pour leur propre habillement.

Le chaudron de Gundestrup n’est pas le seul à montrer un habillement pour le moins original que pourrait avoir revêtu les druides. Car après l’homme-chêne du chaudron d’argent, les archéologues ont retrouvé lors de fouilles un autre étrange bonnet.

UN HOMME-GUI

Les archéologues ont découvert une statue de grès près du tumulus de Glauberg et datée de la première moitié du Ve siècle av. J.-C. Cette statue représente un prince héroïsé coiffé d’un bonnet. De chaque côté du couvre-chef sortent deux grandes excroissances qui ressemblent à des « oreilles de Mickey ». Les équipes qui ont fouillés la tombe à proximité ont découvert un bonnet fait avec une armature de fil de fer, ainsi que du textile et du cuir. Ce qui semble démontrer que le prince a vraiment porté ce bonnet pour le moins étrange.

Prince du Glauberg. Statue en pied découvert en 1994 au Glauberg, Hesse, Allemagne.

Prince du Glauberg. Statue en pied découvert en 1994 au Glauberg, Hesse, Allemagne.  © Heinrich Stürzl

Ces excroissances composant la coiffure du prince sont en fait ce que l’on appelle la double feuille de gui, attribut divin de l’immortalité.

Feuilles du gui.

Feuilles du gui. Photo David Busti, ENS de Lyon.

LES VOYAGEURS DE L‘IMPOSSIBLE

D’après Virgile dans l’Énéide, chant VI, c’est un rameau de gui qui permet au héros de pénétrer le royaume des morts, mais surtout et c’est le vrai défi, d’en revenir. Que penser d’un tel couvre-chef si insolite découvert dans un contexte de sépulture ?

Le prince pensait-il qu’avec un tel attribut sur la tête, qu’il pourrait vaincre la mort ? Faire un voyage dans l’Au-delà et en revenir.

Les druides ne professait-il pas que la mort n’est que le milieu d’une longue vie ?

CONCLUSION

D’après l’étude de l’iconographie du chaudron de Gundestrup, il semble que l’habillement des druides n’est pas uniforme et qu’il pouvait varier au gré des circonstances. Lors de certaines cérémonies, le druide pouvait revêtir la tenue de l’homme-chêne, en d’autres occasions, celui de l’homme-gui. Cependant ces vetements ont un point commun, leur lien avec l’arbre, en l’occurrence le chêne.

©JPS2024

[ACCUEIL]

Image mise en avant :

Masque en or celtique en provenance de la tombe princière de Schwarzenbach ( près de Saint-Wendel, Sarre ), la Tène I, vers 400 avt J.-C.

Masque en or celtique en provenance de la tombe princière de Schwarzenbach ( près de Saint-Wendel, Sarre ), la Tène I, vers 400 avt J.-C. Source : Franck Perrin

NOTES :

[1] Pline l’Ancien Histoire naturelle, traduction d’Émile Littré, Paris, 1877, tome 1, extraits pages 605-606.

Pour en savoir plus à propos de la tombe du Glauberg :

Glauberg — Wikipédia (wikipedia.org)

HABITS DES DRUIDES HABITS DES DRUIDES HABITS DES DRUIDES HABITS DES DRUIDES