LES CAUSES DE LA MIGRATION DES CIMBRES

LES DRUIDES  SAISON 1 ANNEXE 12

Soudain un mystérieux peuple des confins du monde connu entreprend une migration vers la Gaule.

LES CAUSES DE LA MIGRATION

Pourquoi les Cimbres ont-ils entrepris une migration ?

Les sources antiques[1] attribuent à un grand raz-de marée l’émigration du peuple cimbre entre 120 et 115 av. J.-C. Cette assertion n’est pas à prendre à la légère. Le niveau de la mer du Nord a beaucoup évolué au cours des millénaires puisqu’elle est passée en moins de dix mille ans d’une immense prairie sèche et froide peuplée par de grands animaux tels que les mammouths, les rhinocéros laineux, les lions des cavernes, des bisons, des chevaux, des cerfs géants et des rennes à une mer peu profonde (30 m de profondeur en moyenne) peuplées de bancs de harengs et de morues.

DES MAMMOUTHS AU FOND DES MERS

Les pêcheurs dans leurs chalutiers remontent régulièrement dans leurs filets des dents, des os et des squelettes de mammouths partout en mer du Nord. Ces grands animaux sont adaptés au froid et migrent en troupeaux pour trouver de nouveaux pâturages et les chasseurs les suivent dans leurs migrations. Les archéologues ont retrouvé des forêts englouties au large de l’Angleterre sous 13 m d’eau. Le niveau de la mer est monté par moments de 2 cm par siècle. Ce qui est considérable parce que la mer du Nord n’est pas une baignoire aux bords arrondis dans laquelle l’eau monte régulièrement, mais la montée des eaux s’est effectuée par à-coups lors de tempêtes dévastatrices pour le littoral qui ont engloutis en quelques jours voire quelques heures des îles et des rivages entiers, détruisant les récoltes et noyant hommes et bêtes.

DES RAZ-DE-MARÉE DÉVASTATEURS

L’eau avance et submerge une partie des terres et ne se retire plus. Il n’y a pas de documents de l’époque des Cimbres, mais les événements survenus sur l’île de Strand (Schleswig-Holstein sur les côtes de la mer du Nord) est un cas bien documenté de la violence du phénomène. C’est dans la nuit du 11 au 12 octobre 1634 que la tempête Burchardi déferle sur la côte, détruit les digues et engloutit une grande partie de l’île de Strand. Cette tempête exceptionnelle cause la mort de 8 000 à 15 000 personnes selon les registres paroissiaux, dont les deux tiers de la population de l’île de Strand. Les ports et les villages côtiers sont dévastés et engloutis, les bateaux de commerce et de pêches coulés, 1300 maisons sont détruites, 21 églises gravement endommagées et 50000 animaux se sont noyés, La plus grande île de la mer des Wadden est engloutie par les flots, de petites îles apparurent à sa place : les îles de Nordstrand et Pellworm.

Gravure de la grande inondation causée par la tempête Buchardi en octobre 1634. (source : Wikimedia Commons)

TEMPÊTES HISTORIQUES

La liste des grandes inondations en mer du Nord est interminable et dépasse largement le cadre de cet article. Citons le raz-de-marée de la Saint-Marcel en 1219 avec 36000 morts. La seconde inondation de la Saint Marcel aussi appelée Grote Mandrenke (la grande noyade) en Allemagne et au Danemark eut lieu les 15 et 16 janvier 1362 et cause la mort de 20 à 40000 personnes. Plus près de l’époque des Cimbres à Walcheren, une ancienne île zélandaise, aux Pays-Bas, la mer fait irruption par le Nord vers 100 av. J.-C. et ruine l’habitat du Fer établi sur la tourbe[2].

LA FIN D’UN MONDE

Le phénomène de la montée inexorable des eaux entraîne la salinisation des prés et des champs rendant impossible l’agriculture et l’élevage. Ce qui entraîne la famine et le déplacement des populations puis la guerre pour s’accaparer de nouvelles terres déjà peuplées. L’accumulation de ces catastrophes, trop souvent sous-estimés[3], a poussé les peuples à se déplacer et les Cimbres connaissant par le contact avec les Celtes l’existence de la Gaule ont voulu migrer sous des cieux plus cléments. Loin des colères de la mer du Nord. Une marche vers la terre promise en quelque sorte.

LES CIMBRES ENTRENT DANS L’HISTOIRE

Mais Rome à la fin du IIe début Ier siècle av. J.-C. est une puissance en pleine expansion. Les Romains viennent d’annexer le sud de la Gaule et ne peuvent se permettre l’installation d’une multitude de barbares au-delà de leur nouvelle frontière. Car c’est la migration d’un peuple entier, 300000 combattants selon Plutarque avec une multitude beaucoup plus nombreuse de femmes et d’enfants[4]. Les Celtes devant l’ampleur de la migration seront obligés de leur barrer le chemin ; aucun peuple ne pouvant absorber un tel déplacement de population. Le but des Cimbres est simple, celui de trouver de nouvelles terres pour s’installer loin des rivages tumultueux de la mer du Nord. Devant le refus répété de Rome et des peuples celtes, ils deviennent des pillards semant la désolation dans les contrées traversées.

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Image mise en avant :

La migration des Cimbres. Hokusai (1760–1849), La Grande Vague de Kanagawa (détail).

Hokusai (1760–1849), La Grande Vague de Kanagawa (détail).

[1] Festus, Strabon, Florus.

[2] Un nouvel habitat, romain cette fois s’établit sur l’argile ainsi déposée, mais il est recouvert et raviné par une seconde invasion marine vers 270 ap J.-C. André Guilcher, La formation de la mer du Nord, du Pas-de-Calais et des plaines maritimes environnantes. In: Revue de géographie de Lyon, vol. 26, n°3, 1951. pp. 311-329, disponible sur www.persée.fr

[3] Déjà Strabon ne prend pas au sérieux la menace des raz-de-marée et pense que les marées deux fois par jour ne peuvent pas être responsable du départ des Cimbres.

[4] Plutarque, Vie de Marius, IX, 11.